Réflexions de Thich Nhat Hanh pour une religion cosmique inspirée par la science. (à écouter en anglais et/ou lire en français ci-dessous)
Albert Einstein a dit quelque chose qui ressemble à ceci : “La Religion du futur devra être une sorte de Religion cosmique”. Une Religion qui ne sera basée ni sur des dogmes, ni sur la superstition, mais fondée sur l’évidence. Einstein ne pensait pas qu’il existe un Dieu, sous la forme d’une personne, assise dans les cieux et qui décide de tout pour la Terre. Il ne croyait pas en un Dieu personifié. Il a dit par contre avoir en lui un sentiment de Religion. Chaque fois qu’il observait le Cosmos, il voyait l’élégance et la beauté du Cosmos ; cela faisait naître en lui un très grand sentiment d’admiration et d’amour. Il a dit que s’il y avait quoi que ce soit de religieux en lui, c’était cette sensation. Et ce sentiment existe en chacun de nous. Chaque fois que nous voyons ou entendons quelque chose de beau, d’harmonieux, quelque chose d’élégant, nous sommes émus aux larmes. C’est précisément la base de ce sentiment religieux. C’est ce type de Religion que nous pouvons pratiquer ensemble, une Religion fondée exclusivement sur l’évidence. Et les scientifiques peuvent aider à en apporter la preuve.
Dans le Bouddhisme, nous considérons que la Terre, notre Planète, est un Bodhisattva. Nous l’appelons le Bodhisattva de la fraîcheur. Nous ne décrivons pas la Terre comme de la matière. Nous ne faisons pas de différence entre la matière et l’esprit. Quand nous observons un être humain, nous voyons et le corps et l’esprit.
Nous savons que les Cinq Skandas s’appuient l’une sur l’autre afin de se manifester. Nous ne voyons pas le corps et l’esprit comme deux entités séparées. Le corps et l’esprit sont comme les deux côtés d’une pièce de monnaie ; il est impossible de les séparer. Nous ne pouvons pas ôter le corps de l’esprit. Sans le corps, il n’y a pas d’esprit. Et nous ne pouvons pas extraire l’esprit du corps. Ils dépendent l’un de l’autre afin d’exister ; ils se manifestent ensemble, comme la droite et la gauche. Même si elles ont l’air d’être deux choses totalement opposées, comme deux ennemis, la droite et la gauche sont toujours ensemble. Si la droite est là, la gauche est là et vice-versa. C’est comme cette feuille de papier. Nous avons le recto et le verso ; il est impossible de prendre le recto séparément du verso. Le recto dépend du verso pour se manifester. C’est ainsi que nous regardons le corps et l’esprit ainsi que toute chose. Nous ne pouvons pas extraire l’esprit du corps. Nous ne pouvons pas ôter le corps de l’esprit. Ils inter-sont. C’est ce que la physique moderne nomme ‘superposition’ ou ‘enchevêtrement’. Mais le terme ‘inter-être’ est bien plus beau !
La gauche et la droite ne peuvent être d’elles-mêmes : elles doivent inter-être l’une avec l’autre. Donc, si nous croyons pouvoir extraire l’esprit du corps et ôter le corps de l’esprit, ce n’est pas une vue juste.
Il y a aussi l’autre ‘couple’ que forment la Conscience et la Nature.
La science classique est fondée sur la croyance qu’il existe le Monde de la Réalité en dehors de l’esprit. Que l’esprit soit là ou non, l’objet de la Réalité est là. Mais la Tradition Bouddhiste a toujours enseigné qu’il n’existe aucun objet de la Réalité hors de l’esprit. Depuis toujours, le Bouddhisme décrit le Monde des Phénomènes comme les objets de l’esprit. Il y a l’esprit et l’objet de l’esprit. Tous deux se manifestent en même temps. Nous ne pouvons pas ôter l’esprit de l’objet de l’esprit, ni extraire l’objet de l’esprit hors de l’esprit. Esprit et Objet de l’esprit inter-sont. C’est ce que commence à reconnaître la Physique Quantique. Mais ils ont encore un long chemin à parcourir.
Si nous avons la vue juste, notre façon de pensée sera juste. La pensée juste, c’est une pensée libre de discrimination. Discrimination entre Esprit et Corps, Gauche et Droite, Esprit et Objet.
L’Enseignement bouddhiste nous parle de saisie duelle (dual grasping), croire que l’Esprit est une chose et que l’Objet de l’Esprit en est une autre, que l’un et l’autre peuvent exister séparément de façon spécifique. C’est penser à une vague, comme une vague ; considérant que la vague ne peut être les particules. La vague ne peut pas être particule. Et la particule ne peut être vague. Il y a donc une sorte de contradiction ; la dualité ‘vague/particule’. Les scientifiques doivent accepter qu’il y a une contradiction. Ils doivent toucher la nature d’inter-être. Ils décrivent l’objet de la recherche comme ayant la nature d’enchevêtrement, de superposition. Le contact entre Bouddhisme et Science peuvent donc apporter des choses merveilleuses. Et quand nous regardons la Terre Mère, sous l’angle bouddhiste, nous ne la voyons pas comme de la matière. Nous ne faisons pas de discrimination entre matière et esprit. c’est la façon de toucher la Terre. La Terre peut transcender matière et esprit. Et si nous regardons profondément, nous voyons que la Terre est un grand Bodhisattva. Un Bodhsattva peut être une personne mais aussi une Planète ou une Etoile. En regardant la Terre, nous voyons qu’elle a la Vertu de la Persévérance, elle a énormément de stabilité. Elle a la capacité d’embrasser. Elle a la vertu de la non-discrimination. Elle est très patiente. Elle a de nombreux talents, elle aime créer, c’est une merveilleuse artiste, une magnifique peintre. Elle offre la Vie, elle est très céative. Elle est la Mère de tous les Bouddhas sous forme humaine. Le Bouddha Shakyamuni est un enfant de la Terre Mère, il est son Fils. Elle est la Mère de nombreux Bouddhas, Saints et Bodhisattvas. Elle est non seulement la Mère du Bouddha mais aussi celle de la Mère du Bouddha. Elle est aussi la Mère de la Vierge Marie, la Mère de Jésus-Christ. Si nous regardons la Terre ainsi, nous avons alors un sentiment d’admiration, d’amour et de respect. Nous ne la traitons pas comme de la matière. Et quand nous l’envisageons ainsi, avec ce sentiment d’admiration et d’amour, notre connection à elle s’améliore et nous réalisons dès lors que la Terre n’est pas l’Environnement que nous devons protéger mais que la Terre est nous-mêmes. Nous sommes un enfant de la Terre et la Terre est en nous. Si nous savons comment nous protéger, nous protégeons la Terre. Si nous savons comment protéger la Terre, nous nous protégeons nous-mêmes, nous ne sommes plus dans la discrimination. Nous parvenons alors à une forme de Communion. Nous sommes libres de l’état d’aliénation dans lequel nous étions. Nous étions aliénés par rapport à notre propre corps. Nous passons tant d’heures chaque jour dans l’oubli de notre corps ; prisonniers de notre ordinateur, de nos soucis, nous oublions que nous avons un corps. La Pratique consiste à revenir à la respiration, arrêter les pensées, revenir chez nou dans notre corps, détendre le corps. Et si nous pouvons toucher notre corps comme une merveille, nous avons l’opportunité de toucher la Terre Mère en nous, telle une Merveille. Et la guérison s’opère. Beaucoup d’entre nous sont malades car nous avons souffert de cette forme d’aliénation, de coupure avec notre corps, avec le corps de la Terre Mère. Notre Pratique est donc de revenir chez nous, à la Terre Mère et guérir, recevoir la Guérison. La Terre Mère est disposée à nous recevoir à tout moment, et nous aider à être nourris et guérir.
Cloche
Vous êtes nombreux ici à être éducateurs, scientifiques et pratiquants spirituels. Cette année, et les prochaines années, il y a quelque chose de particulièrement stimulant à être réunis, pratiquer ensemble nous asseoir ensemble sur cette Planète Terre. Nous parcourons une merveilleux voyage. Sommes-nous conscients que la Terre nous porte et nous transporte, telle un oiseau géant, à la vitesse de 1600km à l’heure, dans l’orbite du Soleil. Nous devrions mettre notre ceinture et apprécier ! Bouclons notre ceinture et savourons chaque moment de ce que nous pouvons faire ensemble. Etablir les fondations pour ce type de Religion qui peut être partagée à la fois par les Scientifiques, les Philosophes et d’autres Pratiquants spirituels.
Imaginons que nous commençons par cette déclaration d ‘Albert Einstein. Nous avons tous ce sentiment d’admiration et d’amour quand nous voyons la Beauté de la Terre, la Beauté du Cosmos. Cela peut être approuvé et reconnu par les Bouddhistes, les Enseignans et les Scientifiques. Je propose que nous examinions ensemble une trentaine d’aspects analogues. Cela peut faire l’objet de la Retraite d’Hiver et se poursuivre durant la Retraite des 21 jours. Nous pratiquons avec la vision profonde émergeant de notre Pratique et de notre Expérience, la transmission des découvertes de nombreuses générations de Pratiquants offertes à d’autres : Scientifiques, Philosophes, Thélogiens, Yogis et aures. Nous ne proposons que ce qui peut être vérifié et prouvé.
Cela peut être une vision très profonde, comme la non-dualité entre corps et esprit. La non-dualité entre sujet et objet de perception. L’énergie de pleine conscience, concentration et vision profonde est une énergie très puissante qui peut aider à transformer. Les scientifiques n’ont pas expérimenté cela en eux-mêmes.
Si nous savons comment respirer et marcher, une session de marche méditative peut apporter énomément de guérison et de transformation. Et c’est précisément cela l’expérience, Ce n’est pas du discours. d’autres personnes, les philosophes, les scientifiques, les éducateurs, tous peuvent essayer par eux-mêmes, en faire l’expérience et voir. Si nous pouvons prouver le contraire, alors nous pouvons abandonner. Mais si nous ne pouvons pas apporter la preuve inverse, alors nous maintenons la Pratique, nous continuons à pratiquer.
Une des choses que nous proposons ici est de voir les deux sortes de vérité : la vérité conventionnelle et la vérité absolue. Dans la Vérité conventionnelle, il y a naissane et mort, venir et partir, être et non-être.