Dans ce touchant partage, Fern Dorresteyn, Enseignante du Dharma, nous livre ses réflexions concernant les joies et les défis liés à la pratique de la pleine conscience en tant que parent. S’appuyant sur son expérience de maman de trois enfants, Fern propose des moyens pratiques et enrichissants d’intégrer la pleine conscience dans notre quotidien. Cet article est un extrait de son enseignement.
Élever nos enfants avec le cœur
J’adore la pratique. J’ai trois enfants et je sais à quel point il peut être difficile d’être parent, mais aussi à quel point la pratique peut être merveilleuse à vivre avec les enfants et à quel point elle peut m’aider dans mon rôle de parent.
J’éprouve beaucoup de respect et de gratitude envers chaque parent, car vous n’avez pas idée de la charge de travail que cela représente : travailler toute la journée, du réveil jusqu’au coucher, et souvent même pendant la nuit. Et le lendemain matin, tout recommence. Il n’y a pas de répit. C’est incroyable tout ce que nous donnons à nos enfants et à quel point c’est difficile, car ils changent constamment.
Quand mon fils avait environ un an et demi, je me suis dit : « Ce n’est pas vraiment ce que j’avais imaginé. » Je m’étais représenté une vie merveilleuse, où je profiterais pleinement de chaque instant passé avec mon enfant. J’avais appris à pratiquer la pleine conscience au monastère, pendant de nombreuses années. Je le savais donc très bien, au plus profond de moi. Mais ce petit être d’un an et demi bougeait tout le temps, à toute vitesse, il débordait d’énergie. Je ne savais pas comment pratiquer la pleine conscience avec lui. Je sentais donc qu’il me manquait quelque chose, et j’ai compris que je devais m’entraîner à créer une expérience intérieure de ce que signifie être profondément présente à mon enfant.

La pratique du coucher
J’ai établi un programme pour la semaine et défini des horaires consacrés à mon entraînement, en particulier pour les activités régulières. L’une des principales était la préparation pour aller au lit le soir.
Je m’y suis attelée avec autant de sérieux que si j’avais pratiqué la méditation assise. C’était mon moment de pratique sérieuse. Nous montions à la salle de bain, et la première chose que je faisais était de créer cette petite pratique du lavage des mains. Je voulais m’amuser avec ça, et je voulais lui offrir de vivre l’expérience de la beauté de la vie. Je ne savais pas comment faire, alors je me suis interrogée : comment puis-je m’y prendre ? Quels sont les moyens dont je dispose pour y parvenir ?
Alors, j’ai allumé une bougie dans la salle de bain. J’ai pris une petite bassine et un pichet transparent, et je les ai remplis d’eau chaude. J’ai mis quelques petites pierres dans la cuvette. Puis je lui ai demandé de venir, et j’ai versé l’eau sur ses mains, très lentement, pour qu’il puisse vraiment sentir l’eau, entendre le bruit des gouttes et ralentir.
C’était une expérience de la beauté de la vie à cet instant précis, celle de l’eau, celle de ses propres mains. Je lui parlais doucement de la façon dont cette eau se trouvait autrefois dans un nuage, puis était tombée sous forme de pluie sur la terre pour nourrir les arbres, et qu’à présent, elle lavait ses mains. Ensuite, je le laissais jouer dans l’eau jusqu’à ce qu’il ait fini.
Notre corbeille de graines
Chacun·e d’entre nous possède une corbeille de graines. Ce n’est pas ‘ma’ corbeille, mais simplement celle que j’ai, qui fait partie de l’ensemble du jardin. Cette façon de penser m’aide vraiment à ne pas juger les autres personnes, mais à m’intéresser à elles : quelles graines se trouvent dans votre corbeille ? Sans considérer qu’elles sont vôtres ou miennes, mais en voyant ce qui se trouve dans notre corbeille comme notre trésor, notre contribution à la croissance de l’humanité. Nous pouvons travailler avec, le transformer et en profiter. Cette perspective m’a été particulièrement utile en tant que parent. Je suis impressionnée de voir à quel point mes ancêtres élèvent mes enfants. Si je vous disais ce que je pense qu’il faudrait faire, ce serait une chose, mais ce qui sort de ma bouche peut être tout autre.

Accueillir ce que nous pouvons
Parfois, je me sens critique, dure envers moi-même, parce que je ne suis pas la mère idéale que j’aimerais être. Mais il est évident que nous ne pouvons pas nous juger nous-mêmes, car nous n’avons pas choisi nos graines. Les bonnes graines seraient toutes merveilleuses. C’est vraiment une tâche noble que d’accepter certaines graines de souffrance, de les aimer et de trouver des moyens de les ouvrir à une nouvelle expérience afin de ne pas vivre dans la peur ou la colère. Ainsi, elles ne dominent pas nos vies. Nous devons être patients. À un certain moment, j’ai réalisé que je n’allais pas transformer toutes ces graines. C’était pénible, jusqu’à ce que je me dise : « Mais cela en vaut quand même la peine. Il y a tellement de graines profondes en moi, et je ne vais pas pouvoir transmettre uniquement du bien-être à mes enfants. Je ferai de mon mieux, mais je leur transmettrai aussi une certaine souffrance. Et ce n’est pas grave. »
La transformation est possible
Ce que le Bouddha a enseigné de merveilleux, et que les études modernes sur le cerveau confirment aujourd’hui, c’est que la conscience est organique. Rien ne doit rester identique à jamais. Il y a quelques jours, j’ai entendu à la radio que seules quelques émotions simples sont authentiques : l’énergie agréable, l’énergie désagréable, l’énergie intense et le manque d’énergie. Toutes nos autres émotions, celles qui nous sont enseignées dès notre plus jeune âge, nous pouvons les changer. Même quand il s’agit d’émotions fortes, nous pouvons apprendre de nouvelles façons de les gérer.
En tant que parents, nous devrions éprouver du plaisir et de l’enthousiasme pour ce que nous pouvons transformer et ce que nous pouvons offrir à nos enfants. Nous ne devrions pas nous en vouloir lorsque nous n’y parvenons qu’à 10 %. Nous vivons dans une société. Il est difficile de nager à contre-courant. Il est difficile de transformer les choses. Mais c’est possible. Si j’y consacre un peu d’attention et de créativité, c’est possible.
Ressources
- Le centre de pratique ‘Morning Sun’ que Fern et son mari ont fondé aux Etats-Unis
- Mindfulness, Concentration & Insight in Daily Life, enseignement de Thây sur la pleine conscience au quotidien (en anglais avec sous-titres français à activer)