Voici un extrait abrégé d’une entrevue 'un peu oubliée' proposée en 2012 par Jo Confino (journaliste pour le Guardian à l’époque) où il interrogeait Thich Nhat Hanh au Village des Pruniers (plus précisément au Temple de Son Ha). L’interview complète est disponible sur le podcast du Village des Pruniers, 'The Way Out is In'. Il s'agit de l'épisode 47 diffusé le 21 mars 2023 (en anglais avec possibilité d'accéder à la transcription automatique en cliquant sur 'transcript'). Le prochain podcast aura lieu le 5 avril à Londres, pour une interview avec Frère Phap Huu.
Jo Confino : J’ai examiné différentes questions telles que le changement climatique et le fait que, l’année dernière, nous avons connu des conditions météorologiques extrêmes et quantité d’autres problèmes liés au changement climatique et à la destruction de l’environnement. Il semble pourtant que peu de gens veulent agir. Qu’en pensez-vous ?
Thây : Peu de personnes semblent agir en matière de climat, mais ils n’agissent pas non plus sur d’autres plans.
Ils ont beaucoup de problèmes : la relation avec eux-mêmes, leur relation avec une autre personne, leur famille. Ils ne réagissent pas non plus face à ces problèmes. On comprend donc aisément qu’ils ne souhaitent pas s’investir pour l’environnement. Peut-être est-ce trop d’attendre qu’ils fassent quelque chose pour l’environnement ; en effet, il n’agissent déjà pas au niveau du plus élémentaire et essentiel, comme apprendre à se comprendre ou prendre soin de leur souffrance. Ils ont peur de penser à leur propre souffrance, à leurs propres problèmes. Pourquoi auraient-ils le courage de penser aux souffrances de la Terre ou de l’environnement ? C’est l’attitude de beaucoup. Nous avons peur. Nous ne voulons pas voir la vérité.
Jo Confino : Quel serait l’impact s’ils voyaient la vérité ?
Thây : Il est parfois trop tard pour agir quand nous voyons la vérité. Oui, je pense que c’est vrai, c’est trop tard. Des gens comme vous aimeraient les réveiller, mais ils ne veulent pas se lever parce que se réveiller les fait souffrir. Ils continuent donc à rêver pour ne pas souffrir. Ils ne sont pas assez forts pour affronter la vérité. Ce n’est pas qu’ils ne savent pas ce qui se passe, mais qu’ils ne veulent pas y penser. Ils veulent être occupés pour oublier. Ce n’est pas parce qu’ils aiment particulièrement ce qu’ils font qu’ils sont occupés. Ils ont besoin de s’occuper pour ne pas penser à la situation réelle.
Jo Confino : Pensez-vous que nous aurons besoin d’un véritable désastre pour réveiller les gens ? Ou pensez-vous que cela les inciterait les gens encore plus ? Selon vous, qu’est-ce qui pourrait changer l’équilibre ?
Thây : Si vous leur montrez la vérité, si vous leur apportez un film ou des éléments de preuve pour les convaincre de l’urgence de la situation, ils trouveront peut-être un peu de temps pour l’examiner. Mais après cela, ils reviendront à leur façon d’être parce qu’ils ne veulent pas y penser. Ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas assez intelligents pour savoir ce qui se passe.
Je pense qu’il y a d’autres approches, comme leur montrer une autre forme de réalité. Leur montrer une personne heureuse, qui vit de façon détendue. Cette personne n’a pas besoin de beaucoup d’argent ou de pouvoir pour être heureuse.
Nous essayons de leur faire vivre un peu de ce type de bonheur. S’ils peuvent goûter au bonheur de la détente et de la paix, alors il est possible qu’ils changent. Ils verront qu’il ne vaut pas la peine de continuer sur cette voie de l’argent et du pouvoir.
” Il convient donc de les mener là où il y a du bonheur; amenez-les à rencontrer une personne qui est vraiment heureuse. “
C’est là que réside leur chance puisqu’ils pensent qu’il n’y a pas d’autre voie que la leur. C’est de cette façon qu’il faut montrer le bonheur aux autres, afin de les réveiller. Et nous avons besoin de gens qui savent être vraiment heureux pour leur montrer.
Jo Confino : Vous parlez aussi de la ‘non-peur’, du courage de se tenir debout. Qu’est-ce qui aide les gens à trouver le courage de se tenir debout, même au péril de leur vie ?
Thây : Vous avez le courage de le faire, parce que vous avez suffisamment de compassion. La compassion est une énergie très puissante. Sans compassion, c’est impossible. Avec de la compassion, vous pouvez mourir pour d’autres personnes, comme une mère peut mourir pour son enfant. La compassion est possible quand vous comprenez la souffrance. Vous avez aussi la vision profonde, parce que la compassion naît de cette compréhension ; la vision profonde dans la souffrance, et dans le bonheur. Cela vous donne le courage d’agir, de faire, de dire, parce que vous ne craignez pas de perdre quoi que ce soit. Vous n’avez pas peur de perdre la gloire, votre statut, parce que vous savez que ce n’est pas le fondement de votre bonheur.
Le fondement de votre bonheur est la compréhension et l’amour. Ainsi, si vous avez cette vision profonde et que vous vivez selon cette compréhension, vous n’avez plus peur.
Par contre, si vous craignez encore perdre votre statut, votre position, votre maison, etc., vous n’en trouverez pas le courage. Si vous avez connu un certain bonheur, tel que l’amour et la compréhension, vous savez que le bonheur ne provient pas de ces conditions extérieures. Nous savons que le bonheur vient de notre compréhension mentale. Vous savez comment être heureux, vous parvenez à reconnaître les conditions réelles de bonheur dont vous disposez. Alors vous n’avez plus peur. Nous devons apprendre à vivre comme cela, sans peur. Nous devons être suffisamment forts. Nous devons avoir le pouvoir de l’amour, le pouvoir d’abandonner toutes ces choses, et le pouvoir de comprendre. Ces trois types de pouvoirs ne dépendent pas de l’argent, du statut ou de choses du genre. Le pouvoir d’aimer, le pouvoir de pouvoir couper net ce genre d’actions, le pouvoir de comprendre notre souffrance et la souffrance de l’autre personne. Voilà les véritables pouvoirs.
Jo Confino : Quelle est donc la meilleure façon de communiquer avec les autres afin d’apporter un réel changement auprès d’un grand nombre, et non juste quelques personnes ?
Thây : Supposons que vous écriviez un livre sur l’art de la consommation (les gens dépensent et achètent beaucoup chaque jour). Vous pouvez utiliser un langage qui les aide à s’éveiller au fait que ce qu’ils achètent ne peut pas les rendre heureux. Beaucoup de gens consomment pour couvrir leur souffrance. Cela n’aide pas car, durant la nuit, la souffrance resurgit et ils souffrent dans leur propre enfer. Alors, dites-leur comment consommer et que consommer, pour qu’ils puissent guérir. De façon à ce qu’ils touchent un peu plus de paix et d’amour.
Lorsque nous pratiquons la marche méditative, nous consommons du temps. Dans le contexte de la civilisation moderne, marcher de cette façon est une perte de temps car vous ne faites rien. On ne parle pas, on ne pense pas, on marche. C’est une perte de temps. Le temps, c’est de l’argent. Mais pour nous, c’est une bonne consommation, car nous permettons à notre corps de se détendre, à notre esprit de se détendre, de se reposer.
À chaque pas, nous touchons les merveilles de la vie, les éléments rafraîchissants et guérissants de la vie. C’est une bonne consommation. Après une demi-heure de marche de la sorte, on se sent rafraîchi, rétabli. Cela ne nécessite pas beaucoup d’argent ; il ne faut même rien du tout. Nous ne sommes pas contre la consommation. Alors, dites-leur comment marcher depuis le parking jusqu’à leur lieu de travail. Qu’ils puissent marcher de façon à ce que chaque pas restaure leur paix, leur joie et leur amour pour la vie. Apprenez-leur à cesser les pensées.
Jo Confino : Un grand nombre des personnes à qui je parle disent qu’il existe un décalage entre la vie des gens et les impacts de leur vie. Vous achetez par exemple quelque chose sans en connaître la provenance. Vous ne savez pas qui l’a produite. Vous ne connaissez pas les conditions de ces gens. Ils sont extrêmement isolés du monde qui les entoure. Et quoi qu’ils fassent, ils n’en voient pas l’impact. Voyez-vous comme un problème le fait que ces personnes vivent leur vie en étant si déconnectés ?
Thây : Donc, dans ce livre, ‘L’art de la consommation’, on apprend comment manger : l’art de manger. Au lieu de penser et de parler beaucoup, vous arrêtez de parler. Vous arrêtez de penser et vous essayez de manger correctement. Vous regardez la nourriture. Vous entrez en contact avec le morceau de carotte, et vous entrez en contact avec le sol, l’eau, la pluie, le soleil. Vous entrez en contact avec la Terre Mère. En mangeant de cette façon, vous pouvez vous sentir en lien direct avec la vraie vie, vos racines. C’est la méditation, et la méditation est très agréable.
Vous avez l’habitude de manger et il faudrait vous montrer une autre façon de manger, pour que vous puissiez voir comment un morceau de carotte est arrivé jusqu’à vous.
Au début de notre repas, nous lisons les Cinq Contemplations. Tout au long du repas, nous le contemplons ; pas seulement au début. Tout en interrompant nos pensées, nous mâchons chaque bouchée de nourriture de cette façon. Nous entrons en contact avec la nourriture et nous devenons reconnaissants. Tant que vous êtes reconnaissants, vous demeurez heureux. Ce matin, lorsque j’ai touché la Terre, je n’ai pas touché la Terre en tant qu’individu. J’ai vu une lignée d’ancêtres, les ancêtres génétiques et spirituels. Je me vois comme une quadruple Sangha ; et j’ai touché la Terre en tant que très large communauté, pas comme un individu. Je ne vois pas un ‘moi‘ ; je vois toute une lignée. Quand j’ai touché la Terre devant le Bouddha, j’ai vu que le Bouddha n’est pas un soi. Bouddha est la continuation d’une longue lignée. Ainsi, nous voyons les racines du Bouddha, l’origine du Bouddha dans de nombreuses générations. Ainsi, à ce moment où vous touchez la Terre, vous avez la vision profonde du non moi.
La personne assise devant vous est une ambassadrice. Elle représente toute une lignée. Vous voyez qu’elle n’est pas là en tant qu’individu. Elle représente sa lignée, son pays, son peuple. Donc, vous devez voir votre partenaire, votre ami, comme un ambassadeur de toute la lignée. Puis, vous vous inclinez devant lui, devant elle : « Bonjour, madame l’ambassadrice/monsieur l’ambassadeur. » Ainsi, vous pouvez la traiter avec respect, avec admiration, car les talents et les vertus de nombreuses générations sont en elle. Vous ne lui parlez pas en tant que soi. Vous lui parlez avec respect, car il y a aussi un Bouddha en elle. C’est la façon de regarder une personne.
Un pin est constitué de nombreuses générations, et il y a la lune et les étoiles en elle. Donc, vous vous inclinez devant ce pin. C’est une sorte de civilisation, un mode de vie. Si vous apprenez à vivre ce genre de vie, vous n’avez besoin de personne pour vous rappeler de prendre soin de l’environnement. Vous pouvez le faire par vous-même. C’est à ce type de vision profonde que vous pouvez accéder lorsque vous pratiquez le non-soi. Nous vivons ce genre d’expérience. Nous vivons notre vie quotidienne de cette façon. Alors tout ce que nous disons, tout ce que nous écrivons pourra toucher le cœur des gens ; parce que nous écrivons à partir de votre propre compréhension, et non à partir des idées que nous transmet une autre personne. Donc, écrire ce livre ‘L’art de la consommation’ est aussi une pratique. Ceux qui produisent pour notre consommation, et nous, qui allons acheter les produits, nous devrions tous apprendre à consommer.
Jo Confino : Dans les 14 entraînements à la pleine conscience, il est dit : “Nous n’investirons pas et ne commercerons pas avec les sociétés qui contribuent au tarissement des ressources naturelles, qui nuisent à la terre et privent les autres de leur chance de vie.” Ces entraînements nous invitent aussi à prendre clairement position contre l’oppression et l’injustice. Que doivent faire les militants ? Comme vous l’avez dit à juste titre, la première chose à faire est de trouver notre propre bonheur. Mais en termes d’action dans le monde, comment les gens doivent-ils s’y prendre pour s’exprimer contre l’injustice, contre l’oppression ? Comment peuvent-ils le faire d’une manière pacifique et avec détermination ?
Thây : Comme vous le savez, chaque année, les monastiques font une retraite de trois mois et aiment prendre une journée entre monastiques chaque semaine. Nous sommes conscients que si nous ne pouvons pas être nous-mêmes, si nous n’avons pas assez de fraternité et sororité et de bonheur, ce que nous ferons sera dénué de sens. Nous organisons nos journées monastiques de manière à pouvoir obtenir la nourriture nécessaire ; elle doit être suffisante pour nous soutenir en tant que communauté, de manière à nous permettre d’offrir des retraites et des journées de pleine conscience, un peu partout dans le monde. C’est très clair et nous pensons que nous devons être nous-mêmes. Nous ne devons pas nous perdre dans trop de travail. Dans le cas contraire, nous ne serions pas authentiques. Nous ne serions pas sincères dans notre service quotidien.
Le problème n’est pas de réaliser beaucoup de choses, mais de le faire franchement. Nous ne devons pas avoir le sentiment de ne pas en faire assez en termes d’aide. Nous devons être convaincu.e.s que ce que nous faisons est bien fait et juste.
De cette façon, nous pouvons être en paix, car tout ce que nous faisons profite à tout le monde, même si nous ne faisons que de la méditation assise ou marchée. Lorsque nous pratiquons correctement la marche méditative, nous sommes nourris et guéris à chaque pas. Ce ne sont pas seulement nos ancêtres qui en profitent, mais aussi les générations futures. Sans cela, il est impossible de faire quoi que ce soit. Chaque étape est donc la pratique de base. Chaque respiration, chaque assise doit être vraie, nourrissante et guérissante. Ainsi, même si nous n’accomplissons qu’une petite action, comme l’organisation d’une journée de pleine conscience, si nous le faisons de tout notre cœur et avec bonheur, nous accomplissons tout en même temps.
Ainsi, tout ce que nous faisons pour nous-mêmes de manière juste, nous le faisons pour nous tous. C’est ainsi que je vois les choses. Vous n’avez pas besoin de vous faire des complexes en pensant que vous n’en faites pas assez. C’est très important. Je pense que pour contribuer à l’éveil collectif, nous devons fonctionner comme une communauté, comme une sangha. Les journalistes eux-mêmes devraient avoir leur propre sangha, au sein de laquelle ils peuvent partager leurs souffrances et leurs difficultés, leur bonheur, leurs espoirs et leurs réussites. C’est très important. Il est très clair au Village des Pruniers que sans sangha, nous ne pouvons rien faire de significatif.
Prendre refuge dans une sangha est donc une chose fondamentale. Si ce que produit un homme d’affaires est une source toxique pour les gens, il n’apporte de l’aide ni à lui-même ni à ses consommateurs. Nous voulons le changer. Mais comment pouvons-nous le changer ? Il existe de nombreuses façons de faire. La première consiste à aller le voir et à lui dire qu’il est possible d’être plus heureux. Il est possible d’être plus détendu. Il pourrait mener une vie qui ne soit pas aussi frénétique que la sienne. Il est possible d’avoir davantage de joie ou de détente. Il est inutile de se laisser submerger par les soucis, la colère etc ; c’est ainsi que vous pouvez l’aidez. C’est une façon de faire.
Une autre façon est de dire à nos amis de consommer en accord avec les Cinq Entraînements à la Pleine Conscience. Pourquoi devons-nous acheter toutes ces choses ? Nous leur dirons qu’ils ne devraient pas continuer à consommer ces produits. Nous n’en avons pas besoin. Nous avons besoin d’autres types de choses qui nous aident à être en meilleure santé. S’il y a une prise de conscience dans les rangs des consommateurs, alors le producteur devra changer. Sinon, il ne peut pas continuer. Nous le forçons donc à changer en n’achetant pas ce dont nous n’avons pas besoin.
Je peux très bien survivre sans ces appareils électroniques. J’ai davantage de temps pour moi et pour ma sangha si je n’utilise pas tant ces appareils électroniques. Nous pouvons très bien survivre sans télévision, même sans téléphone, sans lire les journaux. Il n’est pas nécessaire de regarder les nouvelles tous les jours voire deux fois par jour. Par contre, si les journaux nous offrent une bonne nourriture, alors nous les achèterons. Il existe donc plusieurs manières de faire. Je pense que si nous fonctionnons comme une sangha et que nous travaillons avec les simples citoyens, nous pouvons changer les choses à partir de là. Nous n’avons pas à persuader les dirigeants de changer, si ce n’est pas facile.
Je pense que Gandhi était capable d’exhorter son peuple à boycotter un certain nombre de choses, et il savait comment prendre soin de lui-même. Il savait que pendant l’opération non violente, il devait prendre soin de lui-même. Il a dit à sa compagne qu’il fallait pratiquer, et s’abstenir de pratique sexuelle pendant cette période.
Nous devons nous entraîner à respirer et à nous préserver, car c’est une lutte difficile. Il connaissait toutes ces choses, la manière de préserver l’énergie, car la lutte est longue. C’est ainsi qu’une pratique spirituelle est indispensable pour tenter d’aider la société à changer. Cette dimension spirituelle dans la vie d’un militant est très, très importante.
Nous devrions nous organiser de manière à ce qu’il y ait davantage de paix, de détente et de guérison dans notre vie quotidienne. Nous devrions avoir des compagnons sur notre chemin ainsi que des sanghas.
Il me semble très important que les journalistes se rassemblent en tant que communauté et communiquent leur point de vue collectif et leur mode de fonctionnement. Au Village des Pruniers, nous avons besoin de moines et moniales pour faire des choses ensemble. Nous devons nous soutenir les uns les autres. Il est très clair au Village des Pruniers que si nous ne restons pas ensemble en tant que communauté, nous ne pouvons rien faire. Nous ne pouvons pas servir, dans le bon sens du travail.
Jo Confino : Comment parvenez-vous à regarder le monde avec paix quand vous y voyez autant de souffrances ? Il y a des guerres partout ; les choses ne se pacifient pas. Si le changement climatique s’aggrave, il y aura des souffrances vraiment terribles. Comment maintenez-vous votre propre sentiment de paix quand vous voyez tout ce qui se passe autour de vous?
Thây : Je pense que notre perception du temps peut aider, parce que cette notion nous semble alarmante. Mais si la Terre Mère souffre, elle sait qu’elle a le pouvoir de se guérir. Si nécessaire, elle prendra cent millions d’années pour se guérir. Nous, nous savons que notre temps sur Terre n’est que de 100 ans, c’est pourquoi nous nous impatientons.
Je pense que le karma collectif, l’ignorance collective de notre race, la colère collective et la violence de notre race peuvent finalement mener à notre destruction. Nous devons apprendre à l’accepter. à moins que la Terre Mère produise un grand être au cours des prochaines décennies ? Alors cette personne nous dira que faire pour éviter cette catastrophe. Nous ne savons pas. Notre Mère la Terre est très talentueuse. Elle a produit des bouddhas, des bodhisattvas, de grands êtres.
Prenez donc refuge dans la Terre Mère, abandonnez-vous à elle, et demandez-lui de nous guérir, de nous aider.
Nous devons accepter que le pire puisse arriver, que la plupart d’entre nous mourront en tant qu’espèce et que beaucoup d’autres espèces mourront également. Peut-être la Terre Mère sera-t-elle capable, dans quelques millions d’années, de nous faire encore revenir, cette fois plus sages. Nous sommes très intelligents, mais nous devons apprendre à être meilleurs.
Avant toute chose, nous devons aimer la Terre Mère. Lorsque vous pratiquez la pleine conscience, et lorsque vous regardez le soleil durant votre marche méditative, la pleine conscience du corps dans le corps vous aide à voir que le soleil est en vous. Sans le soleil, il n’y a pas de vie du tout. Soudain, vous entrez en contact avec le soleil d’une manière différente. Vous voyez changer la relation entre vous et le soleil. Même le soleil vous embrasse comme un père. C’est le pouvoir de la pleine conscience, qui nous apporte la vision profonde. Avant, vous voyiez le soleil comme quelque chose de très loin, n’ayant pas trop de connexion avec vous. Mais en fait, votre connexion est très, très profonde. Vous êtes un enfant du soleil. Vous venez du soleil. C’est également vrai avec la Terre.
Votre façon de marcher vous permet de voir que votre relation avec la Terre est très profonde et que la terre est en vous.
Ce n’est pas très difficile. C’est beaucoup moins difficile que la philosophie. Si vous pouvez marcher de cette façon, votre relation à la Terre Mère changera radicalement. Peut-être pouvez-vous sentir que la Terre Mère est en vous. Vous êtes la Terre Mère. Alors vous n’avez plus peur de mourir, parce que la Terre ne meurt pas. Vous pourriez vous reproduire sous une meilleure forme, sous une forme plus belle. C’est comme une vague. Une vague apparaît et disparaît, avant de réapparaître à nouveau. Pourquoi une vague devrait-elle être capable de mourir ? Ce genre d’intuition peut donc émerger quand vous avez une bonne relation. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’être philosophe pour ressentir cela. Chacun d’entre nous peut voir ce lien.
Jo Confino : Cher Thây, merci beaucoup pour votre temps. Nous vous en sommes très très reconnaissants.
Si vous comprenez l’anglais, vous pouvez entendre Thây via ce lien développer ces différents thèmes (audio en anglais)