Traductions et commentaires des poèmes zen de Thich Nhat Hanh affichés dans les salles de méditation.
Régulièrement, notre maître Thây a offert des versets parallèlesLes versets parallèles (que l’on peut aussi désigner sous le terme de ‘couplets’) sont une forme de poésie vietnamienne, dont chaque vers comprend le même nombre de mots, variant généralement de quatre à sept. Bien souvent, les caractères associés appartiennent aussi à la même catégorie lexicale (nom-nom, verbe-verbe, etc.).créés de sa propre main, pour chaque salle de méditation. Ils sont accrochés de part et d’autre de l’autel principal et leur nature poétique sert d’inspiration à notre pratique.
C’est la première fois que nous proposons une traduction de ces vers, complétée d’un commentaire d’un aîné du Village des Pruniers. Nous espérons que ces versets vous offriront un petit aperçu de la beauté de la poésie zen vietnamienne.
Salle de méditation ‘Assemblée des Étoiles’ (Hameau du Bas)
Le ruisseau bouillonnant, rivière du Nectar du Dharma. Le bruissement du saule, une assemblée de milliers d'étoiles Suối tuôn róc rách dòng cam lộ Dương reo vi vút hội ngàn sao.
Commentaire de Sr Hoi Nghiem :
C’est à l’occasion du nouvel an vietnamien de 2012 que Thây, notre Maître, a spécifiquement offert ces deux versets parallèles au Hameau du Bas. Ces deux versets contiennent les noms de la salle de méditation et du temple situés au Hameau du Bas. Le Temple du Hameau du Bas s’appelle le ‘Temple du Nectar du Dharma‘, et la salle de méditation (également située dans le Temple) s’appelle la ‘Salle de Méditation de l’Assemblée des Étoiles‘. Ces phrases peuvent être vues parallèlement les unes aux autres, à l’entrée de la salle de méditation de l’Assemblée des Étoiles. Mais bien sûr, lorsque Thây nous offre un poème, il nous offre également des joyaux d’inspiration destinés à améliorer notre pratique.
Les deux phrases évoquent de magnifiques images. La poésie est l’art de combiner les mots, elle a le pouvoir d’éveiller des sentiments profonds chez le lecteur. C’est un véritable cadeau pour nous.
Le ruisseau bouillonnant, ruisseau du Nectar du Dharma. (Suối tuôn róc rách dòng cam lộ)
Lorsqu’on est en présence d’un ruisseau, entendre le bouillonnement de l’eau qui coule et la voir ruisseler sur les rochers nous donne l’occasion de nous arrêter, de nous détendre et de profiter de la fraîcheur de sa beauté tranquille et paisible. Nous voulons rester là pour en profiter le plus longtemps possible. Le ruisseau est toujours là ; reste à savoir si nous le sommes pour lui… Sommes-nous préoccupés par d’autres projets, soucis, chagrins et anxiétés ? Parvenons-nous à être pleinement présents pour entendre toutes les richesses que nous offre le ruisseau ?
En chacun de nous se trouvent de nombreux ruisseaux, le ruisseau de la compassion, de la compréhension, de la joie… Nous pouvons pratiquer de manière à ce que tous les cours d’eau en nous demeurent frais, vivants, fluides et non encombrés. La pratique régulière du retour à soi nous aide à générer et à maintenir le bien-être de nos ruisseaux. Comprendre et prendre le temps de revenir à soi, être pleinement présent, nous aide à élever notre source de Nectar du Dharma. Si nous avons soif, quelques gouttes de Nectar du Dharma suffisent à l’étancher immédiatement.
Si nous cultivons nos ruisseaux, c’est dans l’intention de générer le courant du Nectar du Dharma en nous, d’abord pour nous-mêmes et, finalement, pour l’offrir de manière efficace aux autres. C’est quelque chose que Thây avait l’habitude de nous rappeler bien souvent. Par conséquent, lorsque nous pratiquons avec le ruisseau bouillonnant, le courant du Nectar du Dharma est vivant, prospère, et est aisément accessible pour y prendre part.
Le bruissement du saule, une assemblée de milliers d'étoiles. (Dương reo vi vút hội ngàn sao)
L’imagerie du bruissement des saules et une assemblée de milliers d’étoiles sont des images qui vous saisissent les yeux et le cœur. La beauté qui nous environne, et qui nous habite, est aussi élevée que le ciel et offre le même envoûtantement que les nombreuses étoiles rassemblées. Pourtant, la distraction peut nous faire passer complètement à côté. Et nous ratons également le calme, l’espace, l’immensité et la connexion que nous offrent les étoiles.
Le “bruissement du saule, une assemblée de milliers d’étoiles” évoque des images et des sons qui nous invitent à être présents et à communier avec la nature la nuit. La compagnie du saule bruissant et le rassemblement des milliers d’étoiles sont source de solitude et de ressourcement.
Salle du Bouddha (Hameau Nouveau)
Sur un trône de lotus blanc, le Tathagata apparaît, Au milieu de la forêt de bambous violets, demeure Avalokiteshvara. Trên đài sen trắng Như Lai hiện Giữa rừng tre tím Quán Âm ngồi.
Commentaire de Sr Dinh Nghiem :
En 1997, environ un an après l’acquisition du Hameau Nouveau par le Village des Pruniers, Thây a fait en sorte que la salle du Bouddha soit reconstruite. Et il a choisi la couleur violette pour la moquette. Les sœurs du Hameau Nouveau ont ensuite cousu des housses violettes pour les tapis et coussins de méditation. Et lors de la journée de pleine conscience qui s’est tenue au Hameau Nouveau, les frères du Hameau du Haut et les sœurs du Hameau du Bas ont gentiment taquiné leurs soeurs en rebaptisant leur hameau de “Hameau Pourpre”. Cela a duré un certain temps, jusqu’au jour où je m’en suis plainte auprès de Thây : “Cher Thây, pourquoi avez-vous choisi le violet ? Désormais, où que l’on aille, nous sommes la risée des autres hameaux.” Alors Thây ouvrit un livre en chinois et, d’un doigt, m’indiqua ceci : “Ne sais-tu pas que la forêt de bambous violets est la maison d’Avalokiteshvara ? Le violet est une très belle couleur.” Quelques jours plus tard, Thây offrit au Hameau Nouveau une paire de versets parallèles qu’il venait d’écrire en calligraphie. Les sœurs les fixèrent sur deux longs rouleaux de tissu violet et les accrochèrent de part et d’autre de la statue de Bouddha. Ils y sont encore aujourd’hui.
Sur un trône de lotus blanc, le Tathagata se manifeste. (Trên đài sen trắng Như Lai hiện)
Chaque fois que nous mettons le pied dans la salle du Bouddha et que nous voyons le Tathagata assis sur le trône de lotus blanc, nos afflictions se dissipent. Le Tathagata est l’énergie de la compréhension, de la paix et de la solidité. Il est assis sur le lotus blanc, parfumé et pur. Mais ce lotus pousse aussi dans la boue, tout comme sa compréhension, sa paix et sa solidité sont nées des expériences de la souffrance. Si nous savons comment pratiquer, nous pouvons utiliser la boue pour faire pousser des lotus et profiter des fleurs de lotus parfumées et pures. Nous pouvons également transformer notre douleur et notre souffrance en compréhension, paix et solidité.
Au cœur de la forêt de bambous violets, demeure Avalokiteshvara. (Giữa rừng tre tím Quán Âm ngồi)
Face au Bouddha se trouve Avalokiteshvara, le Bodhisattva de l’écoute profonde et de la grande compassion. Nous écoutons afin de comprendre. Dès que nous comprenons, nous pouvons accepter et avoir de la compassion. Le bambou violet est une espèce de bambou à la fois magnifique et rare. Les bambous sont résistants et leurs feuilles sont de couleur verte toute l’année. Grâce à un système de racines entrelacées qui s’étendent et pénètrent profondément dans la terre, et par la nature à la fois très mince et souple de leur tige, ils sont capables de traverser les tempêtes et les ouragans sans être abattus. En pratiquant l’écoute en vue de comprendre et d’aimer comme Avalokiteshvara, nous serons solides et capables de surmonter toutes les difficultés que nous pouvons rencontrer avec nos proches et tous ceux qui nous entourent.
Gardez un œil sur la deuxième partie de ces commentaires ! Nous y aborderons les versets parallèles de laSalle de méditation de l’Eau Tranquille du Hameau du Haut.
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