Cinq façons d’affronter la solitude, en pleine conscience (Partie 1/2)

Cet article vous offre une petite sélection d’enseignements (parmi ceux de Thich Nhat Hanh et d’autres enseignants du Dharma du Village des Pruniers) sur la façon d’embrasser la sensation douloureuse de solitude. (Il sera publié en deux parties à une semaine d’intervalle).

Chaque personne, ou presque, se trouve confrontée à la solitude à un moment ou un autre de sa vie. Thich Nhat Hanh (Thây) a décrit la solitude comme le ‘mal-être de notre époque’. Une vidéo de son enseignement intitulée La solitude et l’illusion de la connexion a été visionnée 1,3 million de fois, ce qui témoigne de la fréquence de ce sentiment. Qu’il s’agisse de cette vidéo ou d’autres enseignements, Thây et d’autres enseignants du Dharma du Village des Pruniers nous ont proposé des moyens de résister à nos réactions habituelles face à la solitude ; ils nous invitent aussi à nous connecter plus profondément à nous-mêmes, aux autres et au monde qui nous entoure. Nous vous en proposons cinq (trois dans cette première partie).

[Afin d’offrir une lecture plus simple et consciente, nous vous proposons les liens vers les sources de cet article en fin d’article.]

1. Résister à “l’illusion de connexion”

Quelle est cette ‘illusion de connexion’ à laquelle se réfère Thây ? Il a observé que pour tenter de nous débarrasser du « vide intérieur douloureux » qu’est la solitude, nous avons tendance à tendre la main pour nous connecter aux autres et essayer de dissiper ce sentiment ; et il est probable que nous le fassions en recourant à de nombreux dispositifs que nous offre la technologie pour rester connectés, tels que les smartphones . Il a observé que consulter ses e-mails, publier et partager sur les réseaux sociaux plusieurs fois par jour ne soulage pas notre solitude :

Nous restons toujours connectées et connectés, mais nous continuons à sentir la solitude. C'est ce qui se passe au moment présent dans notre civilisation moderne... Nous pensons que tous ces appareils nous permettent de nous connecter, mais nous ne pouvons pas vraiment le faire. Comment pouvez-vous vous connecter à une autre personne si vous ne pouvez pas vous connecter à vous-même ?

Depuis le discours de Thây en 2012, les capacités addictives de nos smartphones n’ont fait qu’augmenter. Il y a quelques années, dans le podcast ‘The Way Out is In’, Frère Phap Huu faisait référence à un mème sur les fêtes de fin d’année en ces termes : « Génial, nous allons nous réunir, nous asseoir à la même table, mais nous allons toutes et tous regarder nos téléphones parce que nous ne savons pas comment nous connecter. » C’est quelque chose qui l’a fait rire mais qui l’a aussi effrayé, car cela traduit la réalité de la ‘souffrance moderne’.

Si nous avons l’impression d’utiliser notre téléphone plus que de raison, en quête potentiellement inconsciente de connexion, il nous faut être indulgents envers nous-mêmes, étant donné les efforts déployés par les entreprises technologiques pour rendre leurs produits addictifs. Il existe d’autres méthodes que nous pouvons utiliser pour essayer de ne pas ressentir la solitude, qui peuvent impliquer un rapport malsain à la nourriture, à l’alcool, aux drogues ou au sexe. Quelle que soit la manière dont nous procédons, il peut être bénéfique de reconnaître les façons dont nous recherchons peut-être une certaine ‘illusion de connexion’, et de voir si elles nous sont bénéfiques et, si ce n’est pas le cas, d’expérimenter quelque chose d’autre.

2. Reviens ‘chez toi’ et connecte-toi à toi-même

(Crédit photo : Frère Thien Khai)

Il y a un paradoxe dans ce que Thây nous propose afin d’apaiser la douleur de la solitude : se connecter à soi-même, comme il le décrit, revenir ‘à la maison’. À première vue, cette démarche ne semble pas nécessairement intuitive. Notre instinct peut nous porter à nous tourner vers l’extérieur et nous pouvons instinctivement vouloir faire tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter ce que nous ressentons à l’intérieur de nous. Mais en écho à Thây, Sœur Jina a souligné que nous pouvons être entourées et entourés d’autres personnes et sentir malgré tout la solidude :

Pour moi, le fait d'être seule et le sentiment de solitude sont deux choses différentes. On peut être seul.e sans se sentir seul.e et on peut se sentir seul.e tout en étant avec beaucoup de monde. La différence, pour moi, c'est le sentiment d'être connecté.e.  Lorsque je suis seule et que je me sens en contact avec moi-même, avant tout, et avec d'autres personnes, même si elles ne sont pas physiquement présentes, je ne me sens pas seule. Mais si je ne suis pas très connecté.e à moi-même et qu'il y a quelque chose que je ne regarde pas ou que j'évite, si bien que je ne suis pas vraiment avec moi-même, alors il est également très difficile de me sentir connecté.e aux autres. Il y a alors un sentiment de solitude, même s'il y a des gens autour de nous. La solitude peut être plus aiguë et plus poignante lorsque l'on se trouve dans une foule que lorsque l'on est seul.e. 

Et donc, Thây, comment nous relier à nous-mêmes ?

Il nous suffit de nous asseoir et d'inspirer en pleine conscience, pour, en l'espace de quelques secondes, nous connecter à nous-mêmes. Nous savons ce qui se passe dans notre corps, nos sentiments, nos émotions, nos perceptions, etc. Nous sommes déjà chez nous, en mesure de prendre soin de nous... 

Et Thây poursuit en nous expliquant que, quand nous nous asseyons et prenons conscience des sensations de notre respiration et de notre corps, nous pouvons commencer à nous occuper des sensations difficiles que nous pouvons rencontrer, lorsque nous nous sentons prêts à le faire :

Je suis conscient.e de mon sentiment de solitude, de tristesse, de peur ou d'anxiété. Je souris à ce sentiment de solitude, de peur ou d'anxiété. Je lui dis : « Ma chère solitude, je sais que tu es là, je suis là pour prendre soin de toi. ». Et vous faites la paix avec votre solitude. Vous faites la paix avec votre peur. Il y a un.e enfant blessé.e en vous. Vous la reconnaissez, vous le reconnaissez, et vous le ou la prenez tendrement dans vos bras. C'est ainsi que l'on rentre chez soi et que l'on prend soin de son 'foyer'.

La méditation assise n’est pas le seul moyen de rentrer ‘chez soi’. En marchant, vous pouvez porter votre attention sur la plante de vos pieds et leur contact avec le sol, sur les mouvements de vos pieds et de vos jambes, ou sur votre corps et votre respiration :

Chaque fois que vous faites un pas, que vous inspiriez ou que vous expiriez, vous pouvez revenir à vous-même à chaque pas, ce qui vous ramène à l'ici et au maintenant et vous permet de vous connecter à vous-même, à votre corps, à vos sensations. C'est cela la vraie connexion.

En fait, selon Thây « chaque acte », qu’il s’agisse de boire une tasse de thé ou de café, ou de faire le ménage, « s’il est fait en pleine conscience, peut vous aider à rentrer chez vous ».

3. Apprendre à Aimer

Thich Nhat Hanh illustre comment revenir à nous-mêmes, et comment aider une autre personne à revenir en elle

Thây poursuit en disant que si nous pouvons trouver un foyer pour nous-mêmes, nous pouvons aider un-e partenaire à trouver sa ‘maison’. Dans une réponse à une question sur la solitude, il a expliqué que « la solitude peut se transformer en épanouissement si nous apprenons à aimer » :

L'amour est un art. L'amour, c'est se relier aux autres. Vous pouvez commencer par vous connecter à une seule personne et, si vous y parvenez, vous serez capable de vous connecter à tout le monde et à tout ce qui existe. L'amour véritable a le pouvoir de guérir et d'apporter la plénitude. L'amour signifie offrir le bien-être, la paix et la réalisation.... L'amour est fait de compréhension et de compassion. Si vous ne comprenez pas l'autre personne, vous ne pouvez pas l'aimer. L'enseignement de l'amour véritable est très clair dans cette tradition. Aimer signifie être là, regarder et écouter profondément afin de voir la souffrance, la solitude et la difficulté de l'autre personne. Lorsque vous avez compris cette personne, vous commencez déjà à l'aimer. Lorsque nous sentons qu'il y a une personne qui nous comprend, la solitude présente en nous disparaît car nous sommes compris par une autre personne.

suite de l’article lundi prochain….

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What is Mindfulness

Thich Nhat Hanh January 15, 2020

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