Enseignement donné par Thay le 14 août 1997, Hameau Nouveau, Village des Pruniers, France
Au cours des premières années, lorsque le Village des Pruniers venait d’ouvrir ses portes, Thay avait sa chambre au Hameau du Haut. À l’époque, il n’y avait pas encore de hutte. Et comme les retraitants venaient nombreux, Thay partageait la chambre avec trois enfants. Trois jeunes Vietnamiens. Ils étaient autorisés à dormir à côté de Thay. Et Thay utilisait cette chambre pour recevoir des invités, pour donner des consultations aux retraitants, en particulier aux disciples.
En fait, il n’est pas toujours plaisant de donner des séances de consultation à des disciples. Parce que certains d’entre eux sont assez obstinés. Et ils utilisent des mots qui sont difficiles à écouter, pas aimants. Et Thay veut que chaque séance soit agréable à la fois pour Thay et pour la personne qui le consulte.
Pour cette raison, Thay s’exerce délibérément à ce que chaque séance de consultation d’une demi-heure devienne bénéfique pour les deux. Thay sait déjà que certains disciples prononceront des mots extrêmement difficiles à écouter. Cela prouve qu’ils ne font pas de progrès. Ils ont de mauvaises perceptions, une mauvaise compréhension. Ils peuvent faire des choses qui tapent sur les nerfs de Thay. Ce que Thay veut qu’ils accomplissent, ils ne peuvent pas le faire. Ils progressent un peu et retombent rapidement.
Thay décide donc de scotcher une feuille de papier sur le mur pour se souvenir. Sur cette feuille, Thay dessine un plant de laitue. Et Thay dessine un nuage. Et de ce nuage, la pluie tombe sur la laitue. Thay le colle sur le mur et s’assoit face au mur. Il laisse la personne qui consulte s’asseoir dos au mur, de sorte qu’il puisse voir la personne qui consulte et, en même temps, le dessin qu’il a collé sur le mur. Ce dessin est la cloche de la pleine conscience de Thay.
Voici la signification de ce dessin. Lorsque nous plantons de la laitue, s’il arrive qu’elle ne pousse pas très bien, il ne faut pas se leurrer et blâmer la laitue. En effet, lorsque nous plantons de la laitue, si nous connaissons la particularité de la laitue, si nous lui donnons la bonne quantité d’eau ou d’engrais, la laitue sera verte et en bonne santé. Mais si nous ne le faisons pas, la laitue deviendra laide. Il serait donc absurde de rejeter la faute sur la laitue.
Thay réalise que c’est la même chose pour ses disciples. Mes disciples sont mes plants de laitue. Si je ne suis pas habile dans ma façon de leur enseigner, ils progresseront lentement. Il ne sert donc à rien de se mettre en colère contre eux. La colère ne fait que me blesser et les blesser aussi. C’est pourquoi, pendant la séance de consultation, Thay peut voir la personne qui consulte, et en même temps ce dessin de la laitue, avec un nuage au-dessus et la pluie qui tombe. Avec cela, Thay respire et écoute. Et grâce à cela, Thay n’est pas en colère.
Parfois ils disent quelque chose de très bête, de très ignorant, quelque chose de pas très aimable. Thay reste assis là, respirant et souriant. Puis, avec calme, respect et compassion, je les guide, leur permettant de voir les forces et les faiblesses de leur pratique. Et le dessin qui est collé sur le mur derrière eux… Aucun d’entre eux n’a la moindre idée de la signification de ce dessin. Seule Thay le comprend. Et il a aidé Thay à maintes reprises.
Et toutes les séances de consultation se déroulent très bien parce qu’à chaque séance, il y a de la compréhension et de la compassion. Ce n’est pas que, dans Thay, il n’y a pas de compréhension et de compassion. Il y en a. Mais Thay ne peut pas toujours les maintenir à 100 % pendant la demi-heure que dure chaque séance. C’est pourquoi Thay doit se remémorer avec ce dessin sur le mur.
Si Thay peut le faire, les disciples sont censés faire de même, n’est-ce pas ? Trouvez un moyen de vous en souvenir. Trouvez un moyen de vivre vos intuitions dans votre vie quotidienne. N’attendez pas qu’il y ait des souffrances et des chagrins, ou qu’il y ait trop de difficultés dans votre vie, vous vous précipitez dans un centre de pratique pour écouter un enseignant du Dharma parler afin de trouver un peu de soulagement ou de réconfort, puis vous rentrez chez vous. Cela ne marchera jamais.Nous devons appliquer nos connaissances à la vie de tous les jours. Soyez un pratiquant avisé.
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