Traduction française d’un article paru dans le “Huffington Post”
01/22/2016 04:04 pm ET
Jo Confino, éditeur exécutif
L’architecte des négociations historiques à Paris sur le changement climatique reconnaît que les enseignements de Thich Nhat Hanh ont aidé à arriver à l’accord.
DAVOS, SUISSE – L’un des moteurs de l’accord climatique de Paris est un moine bouddhiste Vietnamien de 89 ans.
Christiana Figueres, qui a mené les débats a reconnu le rôle primordial joué par Thich Nhat Hanh pour l’aider à développer la force, la sagesse et la compassion nécessaires pour construire cet accord sans précédent avec l’appui de 196 pays.
Figueres, la secrétaire exécutif de la Convention cadre sur le changement climatique des Nations Unies, dit que les enseignements de « Thay, » le nom par lequel il est connu par des centaines de milliers de pratiquants dans le monde entier, « sont tombés entre mes mains littéralement » lorsqu’elle a traversé une crise personnelle profonde il y a trois ans.
Elle reconnaît que la philosophie Bouddhiste de Thay, qui actuellement est en récupération après un grave accident vasculaire cérébral, l’a aidée à faire face à cette crise et en même temps lui a permis de maintenir sa concentration sur les débats climatiques.
Figueres a dit qu’elle s’est rendu compte que « j’ai besoin d’avoir quelque chose ici, parce qu’autrement je ne peux pas faire face et accomplir mon travail, et il ’était tout à fait évident pour moi que c’était impossible que je prenne même une journée de repos, » a-t-elle dit à The Huffington Post cette semaine à la réunion du Forum économique mondial à Davos, en Suisse.
« Cela a été un marathon pendant six ans sans aucun répit, » a-t-elle dit. « J’avais vraiment besoin de quelque chose sur lequel je pouvais m’appuyer, et je ne pense pas que j’aurais eu la force intérieure, la profondeur d’optimisme, la profondeur d’engagement, la profondeur d’inspiration si je n’avais pas été accompagnée par les enseignements de Thich Nhat Hanh.”
Alors, qu’est ce que Thay lui a enseigné ?
Figueres le démontre à travers une visite qu’elle a fait au monastère de Thay à Waldbrol, en Allemagne, qui a été un hôpital psychiatrique avec 700 patients avant l’arrivée des Nazis qui, les ayant exterminés, ont pris possession de l’endroit pour la Jeunesse Hitlérienne.
Elle raconte que Thay a choisi de fonder son monastère à cet endroit « parce qu’il voulait démontrer qu’il était tout à fait possible de transformer la souffrance en amour, de transformer l’être-victime en être-vainqueur, de transformer la haine en amour et pardon, et qu’il avait l’intention de montrer cela dans ce lieu qui a été associé avec tant de cruauté absolue et inhumaine ».
« La première chose qu’il a faite a été d’écrire à la communauté Bouddhiste pour dire, ‘Je veux des cœurs. Je veux des cœurs cousus à la main, un cœur pour chacun des patients qui a été tué ici, afin que nous puissions commencer à transformer ce bâtiment, cet espace, et cette énergie, » a dit Figueres à HuffPost.
« C’était une histoire tellement puissante pour moi, vous comprenez ? Parce que d’une certaine manière, c’est le voyage sur lequel nous nous sommes embarquée dans les négociations climatiques, » a-t-elle ajouté. « C’est le voyage de la dénonciation individuelle à la collaboration collective. C’est un voyage du sentiment de paralysie, d’impuissance et de vulnérabilité aux éléments, au sentiment de plein pouvoir pour agir ensemble.
« Véritablement, en mon for intérieur, cela a été un beau voyage de guérison. Ainsi, pour moi c’est comme si je vis ma vie à plusieurs niveaux différents, parce que j’avais besoin de changer ma propre crise personnelle, je devais la transformer », a ajouté Figueres. « Je suis toujours au milieu de cette phase, je ne vais pas dire que je suis complètement à l’autre côté, mais j’avais besoin de faire cela pour moi-même. »
« J’ai ressenti que ceci était exactement l’énergie qu’il fallait pour les négociations sur le changement climatique, entièrement inspirée, vous savez, par cet enseignement incroyable, » a-t-elle dit.
En effet, lorsque Thay est arrivé pour la première fois à l’ancien siège Nazi, comprenant 400 chambres, il a écrit une lettre aux patients qui sont morts, laquelle est lue chaque jour au monastère par les moines et moniales qui y habitent.
« Aujourd’hui, la Sangha (communauté) est venue, la Sangha a entendu et a compris votre souffrance et l’injustice que vous avez enduré, » a-t-il écrit. « Les personnes qui ont causé votre souffrance ont également beaucoup souffert. Ils n’étaient pas conscients de ce qu’ils faisaient à ce moment là. Ainsi, permettez à la compassion et au pardon de naître dans votre cœur afin qu’ils puissent également avoir la chance de se transformer et de se guérir. S’il vous plaît, soutenez la Sangha et les prochaines générations nombreuses de pratiquants pour que nous puissions transformer ces lieux de souffrance en lieux de transformation et guérison, non seulement pour Waldbrol mais également pour tout le pays d’Allemagne et pour le monde.
Thay, qui est reconnu par beaucoup pour être le père de la pleine conscience en Occident et qui est un activiste environnementaliste depuis plus de deux décennies, a d’autres monastères autour du monde et a construit l’ordre monastique à croissance la plus rapide du monde. Il est aussi estimé par de grands dirigeants à travers les Etats-Unis.
L’année dernière, il a été invité par le Président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, au siège de l’organisation à Washington pour un évènement avec le personnel. Le livre favori de Kim est Le Miracle de la Pleine Conscience par Thay, et il fait l’éloge de la pratique du moine Zen qui est « profondément passionnée et compassionnée envers ceux qui souffrent. »
Thay a visité Silicon Valley en 2013 sur l’invitation de Google et on lui a également demandé de diriger une journée de pleine conscience en privée pour les PDG des quinze sociétés de haute technologie les plus puissantes du monde. Marc Benioff, le PDG du géant de cloud computing Salesforce, soutient activement la réhabilitation de Thay après son récent AVC.
Thay a mené une vie extraordinaire, y compris une nomination pour le prix Nobel de la paix par Martin Luther King en 1967 pour son travail dans la poursuite d’une fin à la guerre de Vietnam. Dans sa nomination King a déclaré : « Je ne connais personne de plus méritant de (ce prix) que ce moine doux du Vietnam. Ses idées pour la paix, si elles étaient appliquées, érigeraient un monument à l’œcuménisme, à la fraternité mondiale, à l’humanité. »
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