Les six mantras sont une façon d’exprimer l’amour et la compassion. Ils peuvent être très efficaces pour transformer la souffrance et générer du bonheur dans une relation avec votre bien-aimé·e, un·e ami·e ou un·e collègue. Ils peuvent aussi être pratiqués par les enfants. Peut-être souhaiterez-vous commencer par pratiquer les six mantras pour vous- même, sachant qu’il faut d’abord avoir pratiqué l’amour et la compréhension envers soi-même si l’on veut pouvoir aimer et comprendre autrui.
Un mantra est comme une formule magique. Chaque fois que vous prononcez un mantra, vous pouvez transformer la situation sur-le- champ. Vous n’avez pas besoin d’attendre ! Apprenez ces mantras de façon à pouvoir les réciter quand vous en aurez besoin. Ce qui rend le mantra efficace, c’est votre pleine conscience et votre concentration. Si vous n’êtes pas en pleine conscience et concentré quand vous récitez le mantra, il ne sera d’aucune efficacité. Nous sommes tous capables d’être pleinement conscient·e·s et concentré·e·s.
Le premier mantra
Je suis là pour toi Ce mantra est une pratique, et non une déclaration. Aimer quelqu’un, c’est être là pour cette personne. Mais vous devez d’abord être là pour vous-même. Votre pratique consiste à produire votre vraie présence.
Le premier mantra, « Je suis là pour toi », n’est pas difficile à pratiquer. Aimer quelqu’un, c’est être là pour lui, pour elle. C’est à la fois un art et une pratique. Si vous n’avez pas suffisamment de pleine conscience et de concentration en vous, vous ne pouvez pas être là à cent pour cent, ni pour vous-même ni pour l’autre. Avec la pratique de la respiration consciente, de la marche consciente, de l’assise consciente, vous pouvez ramener votre esprit dans votre corps et vous établir pleinement ici et maintenant de façon à offrir votre présence véritable. Quand vous aimez quelqu’un, vous devez lui offrir ce que vous avez de mieux, et votre véritable présence est ce que vous avez de mieux à offrir.
Avant de pouvoir être là pour l’autre, vous devez d’abord être là pour vous-même. C’est pourquoi nous commençons par pratiquer ce premier mantra envers nous-mêmes. « Je suis là pour toi » signifie aussi « Je suis là pour moi ». L’esprit est ramené dans le corps et nous prenons conscience que nous avons un corps. Nous avons tendance à l’oublier, en particulier quand nous sommes absorbés dans notre travail.
La pratique qui consiste à inspirer et expirer et à ramener l’esprit dans le corps peut être très agréable. Vous appréciez votre inspiration, votre corps et votre esprit. Cela peut déjà avoir un effet sur l’autre personne. Peut-être est-elle d’ailleurs perdue dans ses pensées, dans des regrets au sujet du passé ou des angoisses à propos de l’avenir. Quand vous êtes vraiment là et que vous prononcez ce mantra de tout votre être, vous aidez l’autre à revenir à soi et à être présent, ici et maintenant.
La première définition de l’amour, c’est être là. C’est une pratique. Comment pouvez-vous aimer si vous n’êtes pas là ? Pour aimer, vous devez être là, corps et esprit réunis. Toute personne qui aime vraiment sait que la pratique de la pleine conscience est le fondement de l’amour véritable.
Le deuxième mantra
Je sais que tu es là et j’en suis très heureux·se. Ce mantra est utilisé pour reconnaître la présence de la personne que vous aimez et lui dire que vous êtes très heureux qu’elle soit toujours en vie et que vous pouvez la voir. Tout le monde souhaite recevoir la pleine attention de ceux et celles qu’ils aiment. Dès qu’elle entendra ce mantra, l’autre personne se sentira bien.
Le deuxième mantra est lui aussi très puissant ; il a le pouvoir de créer du bonheur pour vous et pour l’autre en même temps. « Chéri·e, je sais que tu es là et j’en suis très heureux·se. » Vous avez déjà produit votre présence véritable et vous êtes capable de reconnaître la présence de l’autre, une personne qui vous est très chère. Quand vous dites « Chéri·e, je sais que tu es là », vous dites aussi : « Ta présence m’est très précieuse et elle est essentielle à mon bonheur. »
Vous ne pourrez pas faire le deuxième pas tant que vous n’aurez pas fait le premier. Le premier pas est le premier mantra. « Je suis là. Je reconnais ma présence. Je t’offre ma présence, à toi que j’aime. » C’est le plus beau cadeau que vous puissiez lui faire. Rien n’est plus précieux que votre présence. Vous pouvez acheter toutes sortes de choses, mais, quel qu’en soit le prix, rien n’est aussi précieux que votre présence. Avec la pleine conscience, vous pouvez faire en sorte que votre présence soit plus fraîche, plus agréable, plus aimante, et l’offrir à la personne que vous aimez, ce qui vous rendra heureux tous les deux.
Le troisième mantra
Je sais que tu souffres et je suis là pour toi. Vous pouvez pratiquer ce mantra quand vous voyez que l’autre personne souffre. Si c’est la personne que vous aimez, vous devez savoir ce qu’elle ressent. Si vous êtes là pour cette personne, vous remarquerez qu’elle souffre.
Le troisième mantra peut être utilisé quand vous remarquez que l’autre souffre. En le prononçant, vous pouvez l’aider à moins souffrir aussitôt. Vous commencez par pratiquer la respiration consciente, assis ou en marche, pour restaurer votre présence, puis vous pouvez dire : « Chéri·e, je sais que tu souffres et c’est pourquoi je suis là pour toi. » C’est l’amour véritable. L’amour véritable est fait de pleine conscience. Quand vous êtes pleinement là, vraiment présent, vous savez qu’il y a quelque chose qui ne va pas chez l’autre. Dès lors, vous pouvez faire quelque chose pour l’aider : « Chéri·e, je sais que tu souffres. C’est pourquoi je suis là pour toi. » Avant même que vous ayez le temps de poursuivre, votre bien- aimé·e ressentira déjà un certain soulagement.
Quand vous souffrez et que la personne que vous aimez ignore votre souffrance, vous souffrez encore plus. Mais si elle est consciente de votre souffrance et vous offre sa présence pendant ces moments difficiles, vous souffrez déjà moins. Il est ainsi possible en quelques instants d’apporter un soulagement.
Le quatrième mantra
Je souffre. S’il te plaît, aide-moi. Vous pouvez pratiquer ce mantra quand vous souffrez et pensez que c’est l’autre qui a causé votre souffrance. Allez voir cette personne avec pleine conscience et concentration et dites-lui ce mantra. Cela vous semblera peut-être difficile, parce que vous vous sentez blessé. Cela demande effectivement un peu d’entraînement, mais vous en êtes capable.
Le quatrième mantra est un peu plus difficile à pratiquer, en particulier s’il y a beaucoup d’orgueil en vous. Il est utile à pratiquer quand c’est vous qui souffrez en étant persuadé que c’est l’autre qui est à l’origine de votre souffrance. Cela arrive parfois. Si quelqu’un d’autre avait dit ou fait la même chose, vous n’auriez peut-être pas autant souffert. Mais comme c’est quelqu’un que vous aimez qui vous a blessé, vous souffrez terriblement et vous pouvez avoir envie de le punir, parce qu’il a osé vous faire souffrir.
Quand nous souffrons, nous pensons que l’autre est la cause de notre souffrance. « Elle ne m’aime pas. Alors pourquoi devrais-je l’aimer ? » Notre tendance naturelle est de vouloir punir l’autre, par exemple en lui lançant : « Tu sais, je peux très bien survivre sans toi. » C’est une autre façon de lui dire : « Je n’ai pas besoin de toi. » Mais ce n’est pas l’amour véritable. Nous sommes nombreux à avoir commis cette erreur. J’ai aussi fait cette erreur.
Mais nous apprenons. En fait, quand nous souffrons, nous pensons ne pas avoir besoin de l’autre. Nous avions pourtant pris un engagement au début de notre relation, et nous sommes censés faire preuve d’honnêteté et respecter cet engagement. Quand vous souffrez, vous devriez le dire à la personne que vous aimez et lui demander de l’aide. Hélas ! Nous avons tendance à faire le contraire. Nous voulons lui montrer que nous n’avons plus besoin d’elle. Nous préférons nous enfermer dans notre chambre pour pleurer plutôt que demander de l’aide. Il y a de l’orgueil en nous. Or, dans le véritable amour, il n’y a pas de place pour la fierté. C’est pourquoi nous avons besoin du quatrième mantra : « Chéri·e, je souffre. Aide-moi, s’il te plaît. »
C’est si simple, et pourtant si difficile. Mais si vous parvenez à prononcer ce mantra, vous souffrirez moins aussitôt. Je vous le garantis. Si l’autre personne remarque que vous n’allez pas bien et vous demande : « Chéri·e, est-ce que tu souffres ? » et qu’elle essaie de vous réconforter, vous aurez peut-être l’impulsion de répondre : « Souffrir ? Pourquoi est-ce que je souffrirais ? » Mais ce n’est pas vrai, vous souffrez énormément. Si elle vient vers vous et pose sa main sur votre épaule, peut-être aurez-vous envie de lui dire : « Laisse-moi. J’ai besoin d’être seul·e. » Ce genre d’erreur est fréquent.
La pratique du quatrième mantra vous invite à adopter une attitude tout à fait opposée, en reconnaissant que vous souffrez. « Chéri·e, je souffre. Je veux que tu le saches. S’il te plaît, aide-moi. » La formule est en réalité un peu plus longue : « Chéri·e, je souffre. Je ne comprends pas pourquoi tu m’as dit cela. Je ne comprends pas pourquoi tu as fait cela. Je souffre. S’il te plaît, explique-moi. J’ai besoin de ton aide. » C’est l’amour véritable. Mais si vous dites : « Je ne souffre pas. Je n’ai pas besoin d’aide », ce n’est pas l’amour véritable.
Je vous invite à noter ce mantra sur un petit bout de papier de la taille d’une carte de crédit que vous pourrez glisser dans votre portefeuille. La prochaine fois que vous souffrirez en étant persuadé que c’est l’autre qui est la cause de votre souffrance, il vous suffira de le relire et vous saurez exactement ce qu’il vous reste à faire.
Selon cette pratique, vous avez le droit de souffrir vingt-quatre heures, mais pas une heure de plus. C’est le délai à respecter. Vous devez ensuite pratiquer le quatrième mantra. Si vous ne pouvez pas rencontrer la personne, vous pouvez utiliser votre téléphone, votre ordinateur ou écrire un mot sur un papier et le déposer sur son bureau ou à tout autre endroit où elle pourra le voir. Je suis certain que dès que vous commencerez à écrire ce mot, vous souffrirez déjà moins.
Le mantra est composé de trois parties. La première partie est : « Chéri·e, je souffre et je veux que tu le saches. » C’est le partage : vous partagez votre bonheur et votre souffrance. « Explique-moi, s’il te plaît, pourquoi tu as dit ou fait cela. Je souffre. »
La seconde partie est : « Je fais de mon mieux. » Cela signifie qu’en tant que pratiquant de la pleine conscience, si je me mets en colère, je ne vais pas dire ou faire quelque chose qui risque de me faire souffrir ou de faire souffrir l’autre. Je pratique la respiration et la marche en pleine conscience et j’explore ma souffrance de façon à comprendre ce qui l’a réellement provoquée. Cependant, en tant que pratiquant·e, je sais que je ne dois pas être trop certain·e de ce que je crois savoir. J’inspecte ma souffrance afin de déterminer si elle est due à une perception erronée de ma part. Je m’interroge : « Peut-être ne voulait- il pas dire cela ou faire cela ? » En tant que pratiquant·e, je fais désormais de mon mieux pour pratiquer le regard profond et pour reconnaître ma colère et la prendre dans mes bras avec tendresse.
« Je fais de mon mieux » est une sorte de rappel pour vous-même et une invitation pour l’autre personne. Quand le message lui sera parvenu, peut-être se dira-t-elle : « Oh, je ne savais pas qu’il souffrait. Qu’est-ce que j’ai fait, qu’est-ce que j’ai dit pour qu’il souffre autant ? » Puis, vous pratiquerez ensemble le regard profond et si l’un d’entre vous découvre la cause de la souffrance, il doit le dire sans attendre et prier l’autre de bien vouloir l’excuser d’avoir été maladroit, afin que l’autre cesse de souffrir. La deuxième phrase invite ainsi les deux personnes à observer ce qui s’est passé de façon à connaître la cause réelle de la souffrance.
La troisième phrase est : « Aide-moi, s’il te plaît ». Elle peut sembler un peu plus difficile à prononcer, mais elle est très importante. Quand deux personnes s’aiment, elles ont besoin l’une de l’autre, en particulier quand elles souffrent. La souffrance de l’une est la souffrance de l’autre. Le bonheur de l’une est le bonheur de l’autre. En pratiquant le regard profond pour mieux comprendre la situation, elles auront peut-être une idée de ce qu’il faudrait faire pour se réconcilier et retrouver l’harmonie entre elles.
Les trois phrases sont : « Je souffre et je veux que tu le saches. Je fais de mon mieux. Aide-moi, s’il te plaît. » Quand vous prendrez votre petit papier dans votre portefeuille et que vous le lirez, vous vous rappellerez ce qu’il faut faire.
Le cinquième mantra
Cet instant est un moment de bonheur. Le cinquième mantra nous invite à ne pas perdre de vue la chance que nous avons d’avoir autant de conditions pour être heureux, ici et maintenant.
Le cinquième mantra est : « Cet instant est un moment de bonheur. » Ce n’est ni de l’autosuggestion ni un simple souhait. Les conditions du bonheur sont multiples, à condition de savoir les voir. Ce mantra nous rappelle que nous avons beaucoup de chance d’avoir autant de conditions pour être heureux·se ici et maintenant. Que ce soit lors d’une séance d’assise avec un ami ou d’une marche méditative en sa compagnie, vous aurez peut-être envie de prononcer le cinquième mantra, pour vous rappeler à tous les deux que vous avez plein de conditions pour être heureux. Ce serait vraiment dommage de ne pas savoir les apprécier ! Reconnaître que ce moment est merveilleux dépend de notre pleine conscience. Seule la pleine conscience peut vous aider à prendre conscience des innombrables conditions du bonheur qui sont déjà là, ici et maintenant. Aussi, quand vous pratiquez l’assise ensemble, quand vous marchez ensemble ou passez simplement un moment ensemble, respirez en pleine conscience et soyez conscients de la chance que vous avez. La pratique de la pleine conscience transforme le moment présent en un moment heureux, un moment merveilleux. Le·a pratiquant·e est un·e artiste ; il·elle sait comment être heureux·se ici et maintenant en pratiquant.
Le sixième mantra
Tu as partiellement raison. Ce mantra vise à nous rappeler qu’en tant qu’êtres humains, nous avons des côtés positifs et des côtés négatifs. Les louanges ne doivent pas nous monter à la tête et les critiques ne doivent pas nous faire sombrer dans le désespoir.
Le sixième mantra est parfait pour traiter la souffrance causée par les complexes, que ce soit penser que nous sommes l’égal des autres ou penser que nous sommes supérieurs ou inférieurs à eux.
Vous pouvez utiliser le sixième mantra lorsqu’on fait votre éloge ou qu’on vous critique. « Tu as partiellement raison » signifie : « Tu as raison de me critiquer ou de me féliciter, mais seulement en partie, car il y a en moi des faiblesses, mais aussi des forces. » Les compliments qu’on vous adresse ne doivent pas vous faire perdre de vue les aspects négatifs qui sont en vous. De même, quand nous voyons de la beauté en l’autre, nous avons tendance à ignorer ses autres aspects moins beaux. En tant qu’êtres humains, nous avons à la fois des qualités positives et des qualités négatives. Aussi, lorsque votre bien-aimé·e vous dira que vous êtes l’image même de la perfection, vous pourrez lui répondre : « Chéri·e, tu as raison, mais seulement en partie, car tu sais bien qu’il y a aussi d’autres aspects en moi. » Vous faites preuve d’humilité. Vous n’êtes pas victime d’aveuglement, parce que vous savez que vous n’êtes pas parfait·e.
Inversement, face à quelqu’un qui vous critique ou affirme que vous ne servez à rien, vous pouvez dire : « Tu as raison, mais seulement en partie, parce qu’il y a aussi de bonnes choses en moi. »
Cet article est un extrait du livre “Sans boue, pas de lotus” publié par le Courrier du Livre
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