La période de Noël et Nouvel An est synonyme de réjouissances et célébrations mais elle n'est pas dépourvue de difficultés et défis. Nous avons demandé à Soeur Jina, notre grande Soeur et Enseignante du Village des Pruniers comment naviguer en pleine conscience dans ces situations de défis.
Comment passer du temps avec des membres de notre famille ou des amis qui ont des opinions différentes en matière de politique, de climat ou de choix de vie?
Les membres de notre famille peuvent être agacés par les habitudes des uns et des autres ; comment naviguer dans ces situations?
Soeur Dieu Nghiem
(Soeur Jina)
Laissons dormir nos opinions et écoutons vraiment
Lorsque j’interagis avec une autre personne, je remarque si elle est ouverte à moi. Et si je sens la présence d’ouverture chez l’autre, dans le sens qu’elle me voit, cela n’implique pas forcément approbation mais juste ouverture. De mon côté, puis-je offrir la même chose aux personnes que je rencontre ?
Mon expérience me montre que c’est en fait assez simple à faire si je peux permettre à l’autre d’avoir sa propre opinion. Par contre, dès qu’un jugement sur l’opinion de l’autre émerge en moi, l’autre personne peut en quelque sorte s’en saisir et tenter de défendre son opinion. Puis chacun cherche à défendre son point de vue, l’autre personne pouvant manifester beaucoup d’enthousiasme, dans la détermination de nous convaincre de sa façon de voir les choses.
Agir par notre contribution est la seule possibilité dans cette situation, nous ne pouvons pas agir sur la contribution de l’autre. Nous sommes donc invité.e.s à en faire une pratique pour écouter vraiment. Tout au long de l’écoute, nous permettons à nos opinions de prendre un petit repos. C’est une véritable pratique en soi car j’ai déjà pu constater que lorsqu’émerge l’opinion de l’autre personne, et si elle est différente de la mienne, mon point de vue se manifeste directement en moi ; mon opinion s’exprime en moi et me dit qu’elle est correcte, contrairement à l’autre. Et là, je peux lui dire ‘attends une minute, il y a autant de points de vue que de personnes’ ; notre façon de regarder la situation sous l’angle de notre propre expérience de vie nous donne l’impression que seule notre opinion est correcte. Cette prise de conscience m’a rendue beaucoup plus humble concernant mon point de vue.
Créer de l’espace pour l’opinion des autres
Nous posons des choix dans la vie en raison de nos origines, de notre famille, du lieu où nous avons grandi, de notre éducation, notre environnement et selon les différents points de vue qui nous ont été transmis, et que nous avons acceptés. C’est une opinion qui s’est manifestée en raison de causes et conditions. J’ai ce point de vue en raison de telles causes et conditions. Les autres ont cette opinion en raison d’autres causes et conditions. Me souvenir de cela m’apporte beaucoup plus d’ouverture envers leurs propres opinions. Et j’observe si je peux écouter leur point de vue sans le filtre de mes propres opinions. Il s’agit d’une véritable pratique car si j’écoute leur point de vue, le mien va de toute façon émerger, mais un petit espace d’ouverture à l’opinion de l’autre se crée alors en moi.
Les autres enrichissent notre vie
J’aime me questionner sur la façon dont une relation enrichit ma vie. Les relations harmonieuses ne sont pas les seules à enrichir ma vie car l’harmonie englobe de nombreux éléments qui font déjà partie de ma vie. Mais, là, j’ai quelqu’un face à moi qui est différent et, même si je résiste à son point de vue, son opinion peut m’aider à élargir ma façon de voir les choses. En mon coeur, j’ai besoin d’ouvrir de nouvelles portes pour enrichir ma vie. J’aime donc observer les relations, tant celles qui sont faciles que les plus difficiles, à la lumière de cette question ‘De quelle façon enrichissent-elles ma vie ?’ Certaines de mes relations difficiles ont davantage enrichi ma vie que celles qui étaient faciles. Les relations faciles étaient si harmonieuses qu’elles n’ont rien apporté de neuf à ma vie. Je ne m’attends toutefois pas à ce que l’autre personne se pose la même question à mon sujet.
Pratiquer avec les habitudes des autres, et avec les nôtres
En matière d’habitudes, c’est avec les personnes que nous connaissons le mieux que nous éprouvons le plus de difficultés ; et là encore j’ai mes propres habitudes. Si je sens que quelqu’un m’agace, je suis certaine que l’autre personne aussi est agacée par mon comportement. Une habitude est quelque chose que nous faisons et répétons encore et encore. Ainsi, si je prends conscience de la façon dont je réponds mentalement à une situation, une première fois, une deuxième, puis une troisième et une quatrième fois, alors cela devient une habitude de répondre à une situation particulière d’une façon particulière.
Puis-je alors abandonner mes idées préconçues, dès lors que certaines pensées d’évaluation émergent, qu’il s’agisse d’un jugement positif ou négatif ; puis-je le laisser être et juste écouter ? Si je peux faire preuve de compassion, peut-être que cette énergie changera quelque chose dans nos relations sans même devoir en dire un mot.