Un enseignement de Thich Nhat Hanh donné en novembre 2012.
Bonjour, chère Sangha.
Nous sommes dans la salle de méditation Assemblée des Etoiles du temple Nectar du Dharma, au Hameau du Bas, pendant notre retraite d’hiver.
Notre société n’est pas en très bonne santé. Et donc, beaucoup parmi nous sont malades : nous avons besoin de guérison et de nourriture. Nous nous sommes intoxiqués avec des poisons. Notre esprit a beaucoup de poisons, tels que l’avidité, la haine, la colère et le désespoir. Notre corps aussi a beaucoup de poisons parce que nous ne savons pas comment consommer.
Notre Mère la Terre a la capacité de se guérir elle-même et elle a la capacité de nous aider à guérir si nous savons comment prendre refuge en elle. Quand le Bouddha enseignait à son fils, Rahula, il parlait de la Terre, douée des qualités de patience et d’équanimité. La patience et l’équanimité sont les deux grandes qualités de la planète Terre. Si c’est nécessaire, notre Mère la Terre peut passer un million d’années, voire dix millions, à se guérir elle-même. Elle n’est pas pressée. Elle a le pouvoir de se régénérer. Il faut que nous voyions cela. Si nous étudions l’histoire de la Terre, nous savons qu’elle a eu jusqu’ici beaucoup de patience, et aujourd’hui elle est un astre magnifique.
Quand nous marchons, nous sommes conscients que la Terre soutient nos pas. Mais notre Mère la Terre n’est pas simplement sous nos pieds, au-dessous de nous ; notre Mère la Terre est à l’intérieur de nous. Penser que la Terre Mère est seulement l’environnement qui nous entoure, à l’extérieur de nous, n’est pas exact. La Terre Mère est à l’intérieur de nous. Nous n’avons pas besoin de mourir pour retourner à la Terre Mère. Nous sommes déjà en elle. C’est pourquoi il nous faut apprendre comment prendre refuge en elle. C’est la meilleure façon de guérir et de nous nourrir.
La méditation marchée est un des moyens de guérison. La méditation marchée est efficace quand nous savons comment laisser la Terre être en nous et autour de nous. Simplement prendre conscience que nous sommes la Terre. Il n’y a pas grand chose à faire, nous n’avons rien à faire du tout, pour obtenir guérison et nourriture. Tout comme lorsque nous étions dans le ventre de notre mère, nous n’avions pas besoin de respirer, nous n’avions pas besoin de manger, parce que notre mère respirait et mangeait pour nous. Nous n’avions à nous inquiéter de rien. Il est possible, maintenant,de nous conduire de cette façon.
Lorsque vous vous asseyez, laissez la Mère Terre s’asseoir pour vous. Quand vous respirez, laissez la Terre Mère respirer pour vous. Quand vous marchez, laissez la Terre Mère marcher pour vous. Ne faites aucun effort. Laissez-la faire.
Elle sait comment faire.
Lorsque vous êtes assis, laissez l’air pénétrer dans vos poumons. Laissez l’air sortir de vos poumons. Nous n’avons pas à essayer pour inspirer. Nous n’avons pas besoin d’essayer pour expirer. Nous permettons simplement à la nature, à la Terre d’inspirer et d’expirer. Nous nous contentons d’être assis, là, à prendre plaisir à notre inspir et à notre expir. Il n’y a pas de « vous » en train d’inspirer et d’expirer. L’inspiration et l’expiration se produisent tout seuls.
Faites l’essai.
Laissez votre corps se détendre totalement, sans effort de volonté d’aucune sorte. Adoptez l’attitude du fœtus dans le ventre de sa mère. Laissez votre mère faire tout pour vous, respirer, manger, boire. Ceci est possible si vous savez comment prendre refuge en votre Mère la Terre. C’est une grande bodhisattva, elle est la mère de tous les bouddhas, de tous les boddhisattvas, de tous les saints. Shakyamuni est son fils. Jésus Christ aussi est son fils. Nous aussi sommes ses fils et ses filles, et nous devons apprendre à prendre refuge en elle et lui permettre de continuer à tout faire pour nous.
Nous n’avons besoin de rien. Autorisez-vous seulement à être assis ; laissez la position assise se faire. Si vous asseoir n’est pas le résultat d’un effort, la relaxation arrivera. Et vous savez quoi ? Quand il y a relaxation, le processus de guérison commence. Pas de guérison sans relaxation. La relaxation signifie ne rien faire, pas d’effort.
Ainsi, lorsqu’il y a inspiration, ce n’est pas vous qui inspirez. Pendant l’expiration, savourez, c’est tout. Dites : « La guérison est en train de se produire, la guérison est en train de se produire. » Laissez votre corps se régénérer, se guérir, se nourrir. C’est la pratique de la non-pratique.
Si nous observons bien, nous voyons que La Terre Mère a le pouvoir, la capacité de se guérir et de nous guérir. Vous croyez en ce pouvoir, qui vient de votre propre observation, de votre propre expérience, pas de quelque chose qu’on vous a dit ou demandé de croire. La Terre Mère peut se régénérer, peut se transformer, peut se guérir, et peut nous guérir. Ceci est un fait. Si nous reconnaissons ce fait, la foi est là, et nous pouvons prendre refuge. Nous nous laissons guérir par notre Mère la Terre. Assis, nous obtenons la guérison.
En marchant, nous obtenons la guérison. En respirant, nous obtenons la guérison. Nous n’avons rien à faire du tout. Abandonnez-vous seulement à la Terre Mère et elle fera tout.
Quand l’inspiration a lieu – je ne veux pas dire quand vous inspirez –dites : « Ce qui a lieu, c’est que je suis en train d’être nourri, d’être nourri, d’être nourri. » Laissez-vous nourrir. Vous êtes nourris par l’air, vous êtes nourris par les rayons du soleil, parce que l’air vous respire, vous pénètre. Et les rayons du soleil aussi pénètrent en vous. Père Soleil et Terre Mère sont là vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour nous. Même pendant la nuit, le soleil est présent ; sinon, nous mourrions de froid. Comme la Terre Mère, Père Soleil est également en nous, pas seulement là-haut dans le ciel, à l’extérieur. Quand j’ai écrit « Le Soleil, mon Cœur », j’avais cette intuition, cette vision que le soleil est mon cœur, à l’extérieur de moi.
Si nous connaissons la pratique de la non-pratique, nous n’avons pas à nous échiner, à nous battre pour pratiquer. Peut-être pensez-vous qu’il vous faut beaucoup de médicaments, beaucoup d’exercice, pour guérir. Mais le seul exercice qui peut vous guérir est l’exercice du non-exercice. Laissez-vous vous détendre et relâcher toute tension dans votre corps, toute inquiétude et toute peur dans votre esprit, parce que ces choses-là vous empêchent de guérir. Lâchez prise, prenez totalement refuge dans la Terre et le soleil, et laissez-vous guérir. Faites cela dans les quatre positions : assis, allongé, en marchant et en étant debout. Laissez Terre Mère et Père Soleil pénétrer en vous, agir pour vous afin que vous puissiez guérir.
Telle est notre expérience : aucune guérison n’est possible sans détente. Ainsi, quand vous vous asseyez, asseyez-vous de telle façon que vous n’ayez pas d’effort à faire, mais savourez seulement et profondément votre assise. Rien à faire, nulle part où aller. Je savoure simplement le fait d’être assis. Une demi-heure d’assise comme cela, c’est une demi-heure de guérison.
L’inspiration n’a pas besoin d’un soi pour se produire. Je n’ai pas besoin d’inspirer, l’inspiration se produit toute seule. Je savoure, c’est tout. Si je sais comment savourera la respiration, celle-ci deviendra plus agréable. La qualité de la respiration ira en grandissant, parce que je n’essaierai pas d’interférer et de la forcer.
Par conséquent, l’assise devrait être naturelle, sans effort. Même chose pour la respiration, même chose pour la marche. N’essayez pas de marcher, laissez-vous simplement marcher. La marche se produira sans vous. Soyez là, c’est tout, et savourez, parce que si lâcher prise et détente sont là, chaque pas est guérison, chaque pas est nourriture. Pas de guérison possible sans relaxation et lâcher prise.
Nous devrions pratiquer cette chose toute simple afin de guérir et d’aider notre société et le monde à guérir. Si vous faites cela pendant une heure, c’est pour vous une heure de guérison. C’est possible. Rendez cette pratique agréable, rendez-la guérissante et nourrissante. Quoi que vous fassiez, n’essayez pas, ne soyez pas dans l’effort. Prenez refuge dans la Terre Mère. Elle sait comment faire. Elle continue à le faire pour vous, juste comme à l’époque où vous étiez dans le ventre de votre mère.
Thich Naht Hanh
Hameau du bas, Village des Pruniers, 29 Novembre 2012
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